Comme il a été rappelé dans l’article « A propos du flash », l’utilisation d’un flash, qu’il s’agisse de celui incorporé à l’appareil ou d’un flash cobra, doit toujours être considérée comme un complément de lumière ambiante et non comme un substitut à part entière.
Cette notion est fondamentale dans la gestion de la lumière, car la puissance de l’éclair décroissant très rapidement (loi du carré inverse de la distance), le résultat escompté lors de l’utilisation d’un flash ne concernera donc que les plans rapprochés, et même le plus souvent uniquement le premier plan.
Avant d’aborder plus précisément les rapports qui peuvent exister entre le flash et l’obturateur, il convient de se pencher quelques instants sur le mécanisme essentiel de cet élément. De lui dépend le temps d’exposition du capteur (temps de pose), toujours couplé au posemètre.
L’obturateur est probablement la partie de l’appareil photographique qui a le plus évoluée dans le temps. D’abord mécanique, dès le premiers Daguerréotypes, il se résumait à l’utilisation d’un bouchon qui était enlevé puis remis devant l’objectif (de la chambre photographique) pour des expositions qui pouvaient durer plusieurs minutes.
La mécanique sous de multiples formes a pris le relais dès 1870 ; obturateurs à volet, à guillotine (verticale, circulaire, horizontale), à fente, à rideau ou encore central, pour n’en citer que quelques uns…
Très rares étaient les mécanismes de l’époque, pour la plupart animés par des ressorts, qui permettaient d’obtenir des temps de pose inférieurs au 1/100ème s.
L’introduction de l’électricité (comme motrice au mécanisme de l’obturateur) date de 1910 et a permis une course au temps de pose de plus en plus court. L’électronique qui a encore accentué cette performance, permet d’obtenir aujourd’hui des expositions de l’ordre du 1/8.000ème sur les derniers boîtiers réflex.
Sans parler des appareils moyen format et des chambres, qui pour la plupart utilisent des obturateurs circulaires composés de plusieurs lamelles pivotantes en forme d’iris (dont l’avantage principal est de pouvoir synchroniser le flash à toutes les vitesses d’obturation), nous nous limiterons au format réflex 24×36 pour lesquels l’ensemble des constructeurs a adopté le mécanisme à rideaux.
L’obturateur à rideaux est constitué par deux rideaux métalliques (eux-mêmes constitués de plusieurs lamelles) qui se déplacent devant la fenêtre image. L’obturateur doit pouvoir réagir de manière rapide et répétée. Au vu des contraintes mécaniques et des choix techniques opérés par les constructeurs, la vitesse maximale de translation des rideaux (en 2015) tourne aux alentours de 6m par seconde pour les réflex 24×36, ce qui procure une vitesse d’obturation de 1/250e de seconde. (En moyenne 1/250e chez Nikon et 1/200e chez Canon).
Quel que soit le temps de pose choisi, les rideaux se déplaceront à cette vitesse maximale.
La translation des rideaux peut être ou verticale ou horizontale, la translation horizontale étant la plus rapide (moins de distance à parcourir ; 24mm au lieu de 36mm), c’est désormais le choix générique des constructeurs.
Mais alors, comment ça fonctionne ?
Le schéma ci-dessous permet de mieux comprendre le mécanisme de déplacement des deux rideaux, aux différentes phases du temps d’exposition.
En position initiale, le miroir est baissé et les deux rideaux occultent le capteur.
- Au moment du déclenchement, le miroir se relève.
- Le second rideau dégage le capteur en se déplaçant vers le haut (le capteur est toujours masqué par le premier rideau).
- Le premier rideau se déplace vers le bas en initialisant l’exposition.
- À la fin du temps de pose le second rideau masque à nouveau le capteur et achève l’exposition.
- Quasi simultanément le miroir s’abaisse et le premier rideau revient en place, ce qui termine la phase d’obturation.
Pour visualiser un peu mieux les choses dans l’espace et surtout au cœur du boîtier, la séquence filmée au ralenti (dont le lien vous est proposé ci-dessous), permet de bien comprendre le rôle de chacun des deux rideaux.
https://www.youtube.com/watch?v=ptfSW4eW25g
Dans le cas précis ou le deuxième rideau démarre sa descente dès que le premier rideau arrive en bas de la fenêtre nous obtenons le moment le plus court pendant lequel la totalité du capteur est découvert.
Cette vitesse d’obturation particulière égale à la vitesse de déplacement des rideaux c’est la vitesse maximale de synchronisation appelée également synchro flash ou synchro-X.
Pour augmenter le temps d’exposition il suffit de retarder le départ du second rideau et la fenêtre sensible sera d’autant plus exposée. A l’inverse, pour diminuer le temps d’exposition il suffit d’anticiper le départ du deuxième rideau avant la fin de course du premier.
Les vitesses de synchronisation égales ou inférieures à la synchro-X constituent la « synchro lente ».
Il faut savoir que la quasi-totalité des boîtiers vendus sont réglés, par défaut en sortie d’usine, sur une synchronisation flash au 1er rideau, c’est à dire à l’instant précis ou celui-ci termine sa course dans la fenêtre image.
Sur la photo ci-dessous, réalisée en mode synchro flash au 1er rideau, la traînée lumineuse du phare apparaît comme étant située devant le scooter, ce qui a comme effet final de donner l’impression que le scooter recule…
Il y a une solution à ce problème : c’est la synchronisation au second rideau.
La « synchro lente » (donc à une vitesse inférieure ou égale à la vitesse synchro-flash annoncée par le constructeur de votre boîtier ; en général entre 1/200ème et 1/250ème) va nous permettre d’obtenir des effets de filés ou de déplacements lors du déclenchement du flash juste avant que le second rideau ne débute sa course vers le bas.
Sur la photo ci-dessous le 1/60ème, voire le 1/30ème ont pu être utilisés afin d’obtenir la traînée du phare ; le flash ayant figé le scooter juste avant le 2nd rideau
Autre illustration de la synchro au 2nd rideau.
L’exemple classique pour mieux comprendre la différence entre une photo prise avec une vitesse synchro flash au 1er rideau et une photo avec synchro au second rideau, est celui de la chute d’un objet.
A gauche sur le shéma (synchro 1er rideau) : la traînée lumineuse se trouve devant l’objet en mouvement, la boule donne l’impression de remonter, de faire « marche arrière ». Visuellement, le sens du mouvement réel n’est pas respecté.
Explication technique : avec le mode 1er rideau, le flash part dès le début de l’exposition, au début de la chute : l’éclair très rapide du flash impressionne la boule en début de chute (en haut). Ensuite l’objet continue sa course pendant que l’obturateur est toujours ouvert : la lumière ambiante qui se reflète sur la boule blanche va impressionner le capteur sous forme d’une traînée lumineuse.
A droite sur le schéma (synchro 2nd rideau) : la traînée lumineuse se trouve derrière l’objet en mouvement. La boule semble bien tomber… Le sens du mouvement est bien respecté, cela semble visuellement cohérent et naturel.
Explication technique : avec le mode 2nd rideau, c’est exactement l’inverse du cas précédent. L’objet commence à tomber au moment où l’obturateur est ouvert (mais le flash n’est pas encore déclenché) : en début d’exposition, la lumière ambiante qui se reflète sur la boule blanche forme une traînée lumineuse sur le capteur. En fin de course, avant que l’obturateur ne se ferme, le flash se déclenche. L’éclair très rapide du flash fige l’image de la boule sur le capteur juste avant la fin de l’exposition.
Conclusions pratiques :
Pour avoir un effet visuel cohérent et esthétique du déplacement du sujet, il faudra travailler à une vitesse plus lente que la vitesse synchro-flash annoncé par le constructeur du boîtier.
Car à la vitesse synchro-flash, il n’y aura pas de différence entre synchro 1er ou 2nd rideau, l’éclair se déclenchant à la fin du mouvement du 1er rideau correspondant précisément au début du mouvement du 2nd rideau.
Un temps de pose assez long (souvent supérieur au 60ème de seconde), nécessitera l’utilisation d’un trépied pour se garantir des risques de « bougé », tant de l’arrière plan que de la « traînée » recherchée.
Vous l’aurez compris, le mode flash synchro 2nd rideau n’a vraiment d’intérêt que si le sujet photographié est en mouvement. Ce mode permettra de souligner le mouvement naturel du sujet par la présence de traînées lumineuses derrière le sujet.
Si le sujet est statique, que vous soyez en mode premier ou second rideau, n’a aucune importance, vous obtiendrez exactement la même photo. Avec le même temps d’exposition et la même intensité de flash, peu importe que le flash se déclenche en début ou en fin d’exposition puisque le sujet ne se déplace pas.
Comment régler la synchronisation au second rideau sur votre boîtier ?
Dans le cas d’un Nikon :
Sans rentrer dans le Menu « Prise de Vue », pressez le bouton de commande flash (en dessous à gauche du flash intégré) et tournez la molette principale (celle qui est à l’arrière) jusqu’à l’apparition du mot « REAR » (en arrière), sur l’écran de contrôle.
Que vous utilisiez un flash cobra (sur la griffe ou déporté) ou le flash incorporé, vous pourrez alors travailler à des vitesses assez lentes pour obtenir de beaux effets.
Fonction des modèles de boîtiers, le temps de pose maximum pourra varier, mais en général en Mode M(Manuel) et S(Priorité vitesse), vous pourrez descendre jusqu’à 30 secondes (+bulb en M), alors que le 1/60ème sera le temps de pose le plus long autorisé en Mode P(Program) et A(Priorité diaphragme).
Pour les autres fabricants Canon et Pentax, voici à quoi ressemble l’écran de contrôle.
Bon à savoir :
- Le fait de synchroniser le flash sur le 1er ou le second rideau ne modifie pas l’éclairage de l’arrière plan sur la photo.
- Les rideaux se déplacent toujours à la même vitesse quelle que soit la vitesse d’obturation choisie.
- C’est le moment du départ du second rideau qui détermine le temps de pose.
- Le temps d’exposition correspond à la durée ou le capteur est exposé entre le balayage du premier et du deuxième rideau.
- La vitesse de synchro flash ou synchro-X correspond à la vitesse maximale de synchronisation du flash en mode normal. Elle est égale à la vitesse de translation des rideaux et représente le moment le plus court pendant lequel le capteur est dévoilé en totalité.
- La synchro 2nd rideau n’a d’intérêt que pour un sujet en mouvement.
- L’utilisation d’un trépied est très conseillée.
Sources : article synchro-flash-second-rideau sur le site d’Hervé Drouet : http://www.luzphotos.com